Ad nauseam | romainblachier.fr

L’Eglise catholique vient coup sur coup de prendre deux décisions à vocation identitaire qui illustrent à n’en pas douter un fort retour en arriére.

La premiére c’est un document signé mardi 10 juillet par le Pape. Le Saint Siège affirme que seule l’Eglise catholique posséde la vérité de Dieu, ayant la conviction d’être « la seule véritable Eglise du Christ » et , affirme malgré les avancées du Concile Vatican II, sur les protestants et les orthodoxes que  » ces Eglises et Communautés séparées, bien que nous les croyions victimes de déficiences, ne sont nullement dépourvues de signification et de valeur dans le mystère du salut. L’Esprit du Christ, en effet, ne refuse pas de se servir d’elles comme de moyens de salut dont la force dérive de la plénitude de grâce et de vérité qui a été confiée à l’Eglise catholique.« et que les chrétiens issus de la réforme ne peuvent être qualifiés comme faisant partie d’Eglises mais seulement de simples communautés écclésiatisques…

La deuxiéme c’est depuis hier la possibilité d’user indifférement du missel traditionnel et de célébrer des messes en latin dans toutes les églises, sur appréciation du prêtre et/ou de la communauté de paroisse.

Pour ce qui est du premier point,c’est une volée de protestations de la part des autres confessions chrétiennes qui a répondu au Pape .

Le patriarche de l’Eglise Orthodoxe de Roumanie a ainsi réagi vivement, regrettant que ce document mette à mal le dialogue entre chrétiens.Parmis les nombreuses autres déclarations,l’alliance réformée mondiale (protestante) a réagi également « Ce document nous ramène en pensée à l’atmosphère qui régnait avant le concile Vatican II « a déclaré son président, le pasteur Ghanéen Setri Nyomi. Il estime aussi qu’en cette époque « de fragmentation sociale dans le monde entier, tous les chrétiens devraient plutôt renforcer leur témoignage commun et affirmer leur unité ». Le Conseil oecuménique des Eglises (COE), siégeant à Genève (347 Eglises protestantes, anglicanes et orthodoxes), rappelle que chaque Eglise est « catholique », au sens d’« universel« , mais qu’« aucune n’est la totalité de l’Eglise du Christ ».  Du Caire, l’Eglise copte-orthodoxe d’Egypte condamne aussi un texte qui « ranime les tensions ».

Pour mémoire, le Concile Vatican II, moment de changement majeur et de modernisation dans la vie de l’Eglise romaine a eu lieu de 1962 à 1965 et a relancé profondément le dialogue entre chrétiens de différentes obédiences…Les positions du pape actuel mettent profondément à mal les rapprochements.La chose n’est pas surprenante,Benoit XVI étant partisan d’un combat identitaire de l’Eglise Catholique.

Le deuxiéme texte est aussi un retour en arriére par rapport à 1965.A l’époque, la messe se faisait en Latin.La premiére raison en était que c’était la langue universelle de l’Eglise, laseconde était que c’était la tradition (oui je fais court!).Les Eglises protestantes avait depuis leur origine au 16e siécle célébré le culte  en langue « vulgaire » c’est à dire dans la langue de tous les jours, arguant qu’on ne peut échanger sur une parole que si elle est comprise par toutes et par tous…

C’est pour cette même raison qu’il fut adopté par la hiérarchie catholique suite à une décision du Pape Paul VI que les messes seraient désormais célébrées dans les langues d’usages.Un nouveau missel fut édité pour cela et des formulations qui conséidraient que les juifs étaient dans le faux furent supprimées.

Attachés à garder les choses telles quelles, que ce soit à l’intérieur de l’Eglise catholique dans des lieux bien particuliers(comme les paroissiens de l’Eglise Saint-Georges dans le 5e) ou à l’extérieur avec Lefebvre et la fraternité Pie X qui est présente à Lyon au prieuré St-Iréné, certains refusent ces modificaitons.Ce refus de la modernité litturgique se conjugue souvent avec un rejet du dialogue avec d’autres églises et un antijudaisme et une islamophobie marquée.Il n’est pas rare de voir des militants royalistes et/ou d’extrême-droite venir y faire « leur marché aux militants »…

Surtout présents en Europe où l’usage de la litturgie dans la langue d’Ovide se confond avec un fantasme de défense de l’identité européenne, ils ne sont pas trés nombreux (500 000 dans le monde mais 100 000 en France qui est l’un des foyers du mouvement).Benoit XVI, qui avait avant d’être Pape, été chargé par le Vatican de dialoguer avec eux du fait de sa sensiblité à certains de leurs thémes,vient de leurfaire un beau cadeau en libéralisant la messe en latin.Trés militants, ils vont en effet pouvoir peser pour instaurer le vieux missel dans davantage de lieux.Et le retour de la langue de Brutus leur donne en partie raison sur le fond puisque ce que Paul VI a édicté aprés Vatican II (messe en langue du pays) , Benoit XVI le défait, pour leur tendre une perche.

Les réctions des catholiques classiques sont, elles, mesurées.

Nous ne souhaitions pas ce document […] Mais nous accepterons ce que le Pape demande et ferons de notre mieux pour aller dans le sens qu’il demande. » a déclaré l’archevêque de Toulouse et président de la commission liturgique, Mgr Robert Le Gall. Ces propos illustrent bien la position des évêques français.

Ailleurs dans le monde on s’inquiéte:En se prêtant à des petits jeux de langues presques exclusivements européens, le Pape semble une nouvelle fois considérer son Eglise avant tout comme un rempart identitaire de l’occident et non comme une communauté mondiale…