Le poison du vendredi: La Marine marchande … de salades

Stéphane Nivet, mon invité du vendredi, a parfois un poil dans la main. Il a raté ses deux derniers rendez-vous avec nous. Mais il se rattrape cette semaine avec un billet spécial cantonales.

Dimanche soir, tous les plateaux reluisaient de nos meilleurs sondagiers, politologues et autres bienfaiteurs de l’humanité pour indiquer qu’il y avait une poussée impressionnante du Front National, une fièvre sous Marine dont le tsunami allait submerger 2012 et justifier les pires scénarios de nos plus réjouissantes prophéties mayas.

 Et Marine, les incisives fraîchement limées par son visagiste, de se réjouir d’un score historique pour le Front National. On imagine déjà Jean-Marie Le Pen essayer d’enfiler l’uniforme avec lequel il sauta sur Port Saïd en 1956 pour fêter ça dignement, le tout arrosé d’un champagne d’origine incertaine, avec l’idée roborative d’organiser une nuit des longs cantons et de détourner de leur usage principal les ponts de la capitale, un peu comme au temps où certains îlotiers s’étaient nuitamment déshonorés à vérifier Archimède.

On a même vu en boucle défiler une annonce précoce de papa Jean-Marie faisant état en début de soirée d’un score de 65% pour le FN à Hénin-Beaumont, alors que le score final était de 35%. On mettra ça sur le compte de l’âge et d’une inévitable surdité liée à l’écoute abusive de certaines musiques dont il fit commerce du temps où il faisait des scores à 1 chiffre.

 Mais revenons à nos cantons. La progression du Front National, dans le département du Rhône, ressemble à une formidable imposture. Jean-Baptiste Labeur, journaliste à Métro, a montré ce matin qu’en nombre de voix, le Front National a seulement progressé dans 3 cantons alors qu’il stagne ou baisse dans les 24 autres cantons. A Meyzieu, où le second tour oppose FN et UMP, le parti des Le Pen a même régressé de 498 voix par rapport à 2004.

La présence du Front National au second tour des élections cantonales dans 11 cantons du département du Rhône est liée à deux phénomènes, principalement. Certains électeurs de l’UMP ont devancé dès le premier tour les appels à aller à la pêche pour le second tour lancés par l’inénarrable Lionel Luca, député des Alpes très Maritimes, qui s’époumone depuis dimanche pour expliquer tout le mal qu’il pense du Front Républicain, sans doute gêné à l’idée que l’on puisse adosser à « Front » autre chose que « National ».

 Et puis, il y a le tripatouillage assez peu glorieux dont fut victime la loi électorale un soir de décembre 2010 et à la faveur duquel le seuil pour passer au second tour est passé de 10% à 12,5% des inscrits. Chacun aura compris qu’il s’agissait d’éviter des triangulaires avec le FN qui déciment bien souvent les candidats UMP. Comme dirait DSK, « ça truande un maximum … »

 Toutefois, la combine ne fonctionne que si l’on arrive à réunir 12,5% des inscrits. Bien mal acquis ne profite jamais. Les électeurs UMP sont restés devant Michel Drucker et ont voté avec leurs pieds. Et une petite partie de ceux qui se sont déplacés ont voté, eux, avec leur bras …

Stéphane Nivet