Start-up democracy, la Tunisie ? | Romain BlachierRomain Blachier

Ce n’est jamais vraiment facile de synthétiser une ambiance, un instant, un pays dans son ébullition. Ce n’est jamais facile oui. Jamais facile de parler du Parlement tunisien par exemple. Une assemblée qui rappelle sans doute un peu ce que devaient être nos parlementaires constituants il y a presque un quart de millénaire : de l’énergie, de la volonté, un foutoir invraisemblable (les députés ne sont prévenus des travaux que parfois une heure avant) et la volonté de construire un pays.

A cela s’attellent des énergies dans tous les sens, avec souvent (mais pas toujours, comme partout) de la bonne volonté.

La Tunisie, start-up democracy à la croisée des chemins

Il pousse aussi des partis politiques, comme, lorsqu’on lance une start-up (le Premier ministre de transition évoque d’ailleurs sa République comme une start-up democracy), des recompositions, des scissions.

Il y a des organisations concurrentes sur des micro-questions tout autant que de grosses scissions par exemple entre islamistes et forces civiles. On croise aussi des intellectuels brillants dans le parti Al Massar, polarité progressiste avec mon amie Karima Souid et son compagnon Zied, la réalisatrice de cinéma Salma Baccar, grande figure des arts et de la culture avec qui j’ai eu le plaisir d’échanger, et les autres comme le doyen de la fac de Sciences à Tunis. Et puis, dans divers camps, des découvertes comme l’adorable député Selim Ben Abdesselem, qui essaie de tirer Nidaa Tounes, son parti, vers la gauche sociale-démocrate et loin des caciques.

Et merci à Suzanne qui m’a trimbalé un peu partout dans Tunis et sa banlieue. Et puis à la célèbre journaliste d’investigation et blogueuse politique tunisienne Olfa Riahi avec qui la conversation fut passionnée et passionnante. Par exemple sur les débats autres qu’institutionnels, qui sont parfois pour l’instant, au vu de la période, relégués au second plan. Olfa Riahi semblait par exemple effarée du manque de débat sur la réforme possible de la caisse de compensation, qui permet de subventionner le prix des denrées de première nécessité dans ce pays où le salaire minimum est de 160 € par mois.

Et puis il y a les enjeux des relations internationales, celles avec le FMI, celles avec le Qatar, qui entend jouer un rôle important notamment en soutenant certaines forces politiques islamistes.
Celles avec l’Europe, celles aussi avec la Chine, qui prennent des positions économiques déterminées.

Quelle économie pour cette start-up democracy ? Être un atelier. Un lieu de tourisme bon marché ? Cela aussi mais autre chose en plus ? Comment former le pays à répondre à ses besoins et enrayer une partie du chômage des jeunes diplômés ? C’est justement sur la contestation de cette économie low-cost que s’est fondée la révolution tunisienne…

Tiens il n’y a pas d’école du tourisme justement en Tunisie alors que le secteur est un élément fondamental de l’économie locale. J’ai aussi découvert une appétence forte de la Tunisie pour le numérique alors que des opportunités gigantesques sont possibles dans ce pays. Et ceci tant en matière technologiques que de sites de contenus.

Une start-up democracy on vous dit! Des chances économiques comme politiques. Et encore en quelques jours de tourisme politique, j’imagine être très loin d’avoir tout vu. Reste aux Tunisiens à voir leur chemin, à faire de leur start-up democracy une pépite. Merci à tous pour votre accueil.