Lumiéres | Romain BlachierRomain Blachier

Note modificative:Suite à vos mails me signalant l’impossibilité de commenter  suite à un problème technique je republie ce billet initialement daté du samedi 7 juin en espérant que typepad ne buggera pas cette fois-ci.A priori ce coup-là c’est bon.

Il fait moche aujourd’hui à Lyon du coup les différents pique-nique de midi (on semblait s’être donné le mot en ce samedi de début juin pour en organiser) auxquels j’ai été invité pour des raisons politiques ou personnelles ont soit été reportés dans des salles soit ont compté seuls les plus vaillants et déterminés.Espérons qu’il fera beau pour le déterminant match LOU-rugby/Agen demain! Quand à ma soirée de ce soir, à savoir barbecue dans des maisons troglodytes,elle est sérieusement compromise!

Et ce mauvais temps joint à la petite crise d’insomnie de cette nuit m’incite à passer quelques heures à bouquiner.Outre les différents ouvrages mentionnés sur la colonne de droite, la lecture en particulier de deux revues cette après-midi comme la derniére livraison du Meilleur des Mondes et du 143e numéro de Points de Vue Initiatiques.Si c’est le titre de la deuxième publication qui inspire ce billet « le 21e siècle nouveau siècle des lumières ? », le thème du premier sur la révolution iranienne, un jugement douteux chez les ch’tis et l’actualité sur  le référendum irlandais fournissent il me semblent une partie de la réponse, qui est qu’on semble parfois aller plutôt dans le sens inverse.

Allons nous vers un siècle des lumières ou sommes nous définitivement prisonniers d’un matérialisme et des faux échappatoires à celui-ci ? Telle est la question posée par la revue Points de Vue Initiatiques.Telle est celle que je ne développera pas ici.L’objet de ce billet n’est pas de trancher le débat philosophico-spirituel en l’espèce mais plutôt de se demander si en l’espèce nous ne sommes pas en train d’aller dans le sens justement d’un recul, notamment en matière de ce qui fut l’une des grandes conquêtes des esprits éclairés, à savoir la Liberté, l’autonomie de l’individu, l’Egalité de tous devant les lois et la Fraternité universelle.

La décision récente du tribunal de Lille sur l’annulation d’un mariage parce que la mariée n’était pas, contrairement à ce qu’elle disait, vierge, a fait couler beaucoup d’encre.Sans m’étendre sur un sujet sur lequel il a beaucoup été écrit, ni sur la réaction crétine de Rachida Dati à l’assemblée qui a fait scandale précédée d’une autre pas plus intelligente qui justifiait initialement le jugement, disons que la chose marque un recul de la liberté individuelle à deux niveaux.Le premier c’est bien évidemment celui de considérer comme valable de répudier sa femme pour le fait qu’elle ne soit pas  vierge (et de ne pas le demander au mari…) est un recul sur la liberté sexuelle et celle de façon générale de décider de sa vie.L’argument est en outre plus que douteux au plan juridique comme le note un des grands noms du Droit dans notre ville, le professeur Fulchiron, président de l’Unversité Lyon 3.J’ajouterais pour ma part qu’en considérant qu’il y a tromperie sur une « qualité essentielle »  le jugement met également un pied dans la question religieuse, à laquelle l’Etat se doit d’être neutre, toujours dans une philosophie de séparation des autorités civiles et religieuse, autre idée née des lumières.

Le professeur dans cette affaire a raison de mettre en garde ceux qui voudraient assimiler l’islam de France dans son ensemble à cette affaire douteuse.La plupart des musulmans français ont été bien évidemment choqués par cette décision Une élue de confession islamique m’a fait rire ce midi en me disant « Elle a qu’a dire que qu’elle est pas vierge parce que c’est lui qui l’a niquée avant le mariage ! « .

Le second niveau de problématique, c’est que le jugement aura un dégât collatéral en matière de liberté publique.

En effet, en interjetant appel (Que pouvait-elle faire d’autre ?) après une série de gaffes, la Ministre  créé un précédent en s’immisçant dans une affaire au civil, dans une question privée sur le mariage…Un autre recul…Mais aurait-il été dans l’esprit de liberté d’interdire à quelqu’un de vouloir se marier en fonction des critéres qu’il veut, même les plus absurdes ? Non mais il n’appartenait pas à mon sens à un tribunal de la République non plus de se prononcer…Où est le chemin de la liberté qu’est censé guider la République ?

Autre question qui montre la nécessité du combat pour la liberté des lumières, c’est le dossier sur l’Iran et notamment l’entrevue de Michel Foucault republiée dans le Meilleur des Mondes et datant d’immédiatement après l’installation de l’islamisme à Téhéran en 1979.
On y voit clairement que le monde alors ne comprend pas ce qu’est cette nouveauté à l’époque, une révolution religieuse en fin de XXe siècle, qu’on n’appréhende pas du tout ce que l’apparition d’une théocratie va changer pour le monde, comporte comme questionnement, comme remise en cause à la fois du dialogue international et de l’islam politique.
On ne voit pas que se pose un modèle qui sous les oripeaux progressistes du début tue très vite les opposants gênants et les amis de gauche d’hier, on ne sent pas que les financements et l’influence de cet Etat vont remettre en cause les femmes, la démocratie, le rapport entre une part de l’islam et la politique, la question du dialogue entre civilisation, amener un terrorisme religieux, la remise en cause de la liberté individuelle… Des années plus tard,il y a toujours des Chavez pour manquer d’inspiration et, pour des questions de gaz mais aussi par idéologie, aller soutenir un régime où le sexe en-dehors du mariage n’est pas cause d’annulation de l’union mais de lapidation…Où le chemin vers l’égalité pronée il y a déjà longtemps par la révolutionnaire Olympe de Gouges?

Dernière question du jour qui me fait penser que la question posée par Point de Vues Initiatiques est « Pour  le moment on est mal barrés », c’est celle du référendum du 12 juin en Irlande sur le traité de Lisbonne.Evidemment les partisans du non n’ont rien à voir avec des mollahs iraniens fanatiques bien sur, il n’est qu’a prendre l’exemple d’Emmanuelli,avec lequel je ne suis pas toujours d’accord mais qui est fervent laic et défenseur de l’égalité.Bon on en dirait pas forcément de Dieudonné ou de De Villiers autres partisans du non…

Bien évidemment il y a tout un tas de gens bien qui votant non à des traités européens pour différentes raisons, que  je  n’ai à titre personnel jamais trouvées convaincantes mais qui ne partiaient pas forcément d’un mauvais sentiment…Il me semble que le combat des nonistes irlandais, comme celui des français il y a quelques années dans un référendum où Lyon et le 7e avait par contre largement voté oui,ne va pas dans le sens d’un progrès social et politique. Pour être valable un traité international se doit d’être ratifié par l’ensemble des Etats qui le signent (et voter non en France n’a pas changé cela contrairement à ce que croyaient quelques-uns!).
Or si l’Irlande vote non c’est tout le processus de tentative de sortir l’Union de l’ornière qui capote…Et c’est ce qu’ont compris tout un tas de nonistes de tous poils qui viennent faire campagne pour mettre un coup d’arrêt définitif au projet européen…Nombre d’entre eux viennent à l’initiative du Sinn Fein, principale organisation politique opposée au traité,qui fait campagne au sud de l’Irlande pour le non de façon certes moins violente que les attentats que commettait encore il y a quelques années sa branche armée, l’IRA, contre des citoyens de l’Ulster, notamment quand ils avaient le mauvais goût de faire partie de la majorité protestante du nord de l’ile…N’en reste pas moins que leurs efforts portent et que les sondages vont vers le non désormais…et que l’eurosceptisime grandi en europe.Même si les serbes ont fait gagner les europhiles, l’unité européenne traverse une sale passe.Où est le chemin de l’idée des lumières de fraternité universelle, celle de citoyen du monde, celle prônée par Voltaire?

C’est ce chemin à retrouver qui rend ainsi aujourd’hui plus que jamais nécessaire l’engagement, qu’il soit spirituel et/ou politique.Lao Tseu disait à juste titre « Plutôt que de de maudire les ténèbres, allume une bougie« .C’est, je le crois nécessaire, si nous voulons trouver lumière et fraternité…