Il y a plusieurs demeures dans la maison de mon Père. Si cela n’était pas, je vous l’aurais dit. Je vais vous préparer une place. (Jean 14.2)
Aujourd’hui ouvre une nouvelle ère dans le protestantisme français: une deuxième fédération nationale va voir le jour pour regrouper des églises et autres associations de l’autre christianisme.
Il existe depuis un siècle une fédération protestante de France (FPF). Celle-ci regroupe de multiples confessions: luthériens, une partie des évangéliques, les libristes, certains pentecôtistes ainsi que la plus grande confession française du protestantisme, l’Eglise Réformée à laquelle j’appartiens. Des structures comme l’Armée du Salut , la CIMADE ou l’Entraide Protestante s’y rattachent également.
A côté de cette fédération, un certain nombre d’églises évangéliques existent depuis toujours, s’en tenant à l’écart soit par volonté d’indépendance, soit par des désaccords théologiques ( Pour prendre un seul exemple, certaines d’entre elles refusent le mystère féminin et donc, tout comme les catholiques, réfutent la possibilité aux femmes d’être pasteurs ou prêtre) soit à cause de questions sociétales. C’est ainsi par exemple que les Assemblées de Dieu, principale église pentecôtiste en France (très bien implantée à Lyon) a refusé de rentrer à la FPF parce qu’il s’y déroulait un débat sur les droits des homosexuels…
Aujourd’hui, une partie de ce tissu évangélique se structure donc indépendamment en Conseil National des Evangéliques de France. Un moment important pour ce milieu.Une nuance toutefois: un grand nombre d’églises de la mouvance restent en dehors la nouvelle structure, les autres se maintenant à l’intérieur de la FPF.
Une partie du milieu protestant regrette ce choix de seconde fédération, parlant de division dommageable, ceci alors que la FPF est actuellement présidée par un évangélique. Je n’en suis pour ma part pas sûr. Le poids des évangéliques français est certes en hausse ces dernières années dans le protestantisme français. Actif, dynamiques, ils sont par ailleurs très impliqués dans l’évangélisation. Tant mieux.
Mais à vouloir trop rassembler ce qui est disparate, la FPF risquait par ailleurs de ne plus pouvoir participer au débat public et n’avoir ni odeur ni saveur. Que ce sur les questions théologiques, où la lecture littérale de la bible des uns a du mal à se conjuguer avec le libéralisme biblique des autres ou sur le plan éthique où des positions claires en matière de bioéthique, d’avortement, d’homosexualités se doivent d’être plus clairement tranchées. Combien de fois me suis-je trouvé, c’est heureux, bien plus d’accord dans des débats avec des musulmans et catholiques libéraux en face à d’évangéliques conservateurs ? Certains d’entre eux, heureusement pas tous, dénient même le qualificatif de chrétiens aux églises ne faisant pas partie de la mouvance évangélique ! Sans parler de certaines dénominations, parfois fort peu ouvertes au dialogue avec les catholiques et les musulmans. Bref, à moins d’être une simple alliance technique, la FPF risquait de n’avoir aucune existence réelle à force de vouloir concilier irréconciliable.
Oui il y a des clivages réels dans le protestantisme français et oui ce n’est pas la création d’une fédération qui change quoi que ce soit sur le fond. Reste à vivre en bon intelligence et à dialoguer. Reste à réfléchir aux aspects pratiques. Mais pour le réformé que je suis, cette diversité officialisée est plutôt une bonne nouvelle et une chance de réveil.