Où je parle d’assistanat et du courage des méres célibataires. Paru ce jour sur Lyon Mag.
Un temps de télé. Un zapping je crois. Une mère seule et ses deux petits. Un témoignage. Un repas. Maigre. Les deux jolis enfants qui mangent. La mère qui les regarde.
La fillette qui explique, déjà gênée malgré son très jeune âge : « Maman nous regarde manger quand il n’y en a pas assez. » On est en France en 2012 et nous produisons largement, très largement plus de nourriture que notre nation n’en dévore. Et pourtant cette dame ira le ventre vide dans la vie pour épargner ses petits. Qui peut-être, eux aussi parfois ne mangent pas à chaque repas. Les larmes me viennent. 30% des femmes sont de nos jours en situation de précarité dans notre pays, à des degrés divers, contre 5 fois moins pour les hommes. Parmi elles, un nombre considérable de mères seules. L’histoire se répète, encore plus dans les milieux déjà en difficulté financière : un homme, une femme, un puis peut-être plusieurs enfants. Les fins de mois qui arrivent le 2, la tension, la misère. Et le père qui s’en va, laissant la mère se débrouiller seule, entre les bouches à nourrir, les insécurités du lendemain, le travail parfois à trouver devant un employeur trop souvent méfiant envers la capacité d’investissement des femmes isolées. Quel courage que nous montrent celles qui ont à affronter nombre des difficultés du sort. Des héroïnes pour nombre d’entre nous. Pourtant trop de monde en politique donne un autre nom à ces dames : des assistées. Loin d’autres époques où l’humanisme était la dominante de toute la République, pendant l’actuelle campagne législative comme durant la présidentielle où Nicolas Sarkozy voulait organiser un référendum sur les aides sociales, une trop large partie de la droite n’a cessé de stigmatiser ceux que le sort plaçait sous l’aide sociale. Sans penser que très souvent, entre assistants, secrétaire, collaborateurs divers, nombre de chantres de l’autonomie et du chacun pour sa gueule sont bien plus aidés dans leurs tâches qu’une mère célibataire. Qu’importe que la solidarité soit aussi la dignité de notre société et de notre République, qu’importe que l’aide soit aussi un tremplin pour rebondir et aller vers des jours meilleurs et plus autonomes, qu’importe que le vrai problème soit de trouver d’abord des ponts pour faire sortir vers le haut les gens de la solidarité publique. Qu’importe qu’on paye même des agriculteurs pour ne pas produire davantage de cette nourriture qu’on veut refuser aux plus démunis. Il était plus urgent de continuer à creuser la dette en défiscalisant les impôts du 1% des plus riches de nos concitoyens que de penser pourquoi une mère de famille n’a pas toujours de quoi nourrir ses enfants en France en 2012. Il était plus urgent d’essayer de dresser ceux qui exercent une activité professionnelle contre ceux qui n’en ont pas. Si les retraités, donc bénéficiant eux aussi d’un système de répartition collective, ont choisi Sarkozy, les actifs de ce pays, qui produisent de la richesse permettant de financer la solidarité, n’ont pas été dupes de cette tentative de séparation, au contraire des inactifs: ils ont voté nettement majoritairement pour François Hollande.
Sans doute qu’ils avaient quelque part eux aussi envie qu’elle soit un peu plus respectée cette mère et ses enfants. Et qu’elle puisse avoir de quoi manger avec eux à table !