Juan, Jegoun, Disparitus s’interrogent tous trois sur la blogosphére politique et son avenir, chacun sur des bases différentes.
Pendant que Disparitus est pessimiste, Juan évoque lui l’utilité militante des blogs engagés et encourage ceux qui tiennent des sites militants à ne pas se contenter de cela, à porter l’information, les combats politiques ailleurs que sur leurs carnets virtuels. Militant politique, associatif et élu, je ne peux que souscrire à ce propos qu’il faut méditer un peu:
D’un côté, le blog est parfois le moyen pour quelqu’un de faire de la politique de cette façon, dans un monde trop riche d’inégalités, alors qu’il ne s’y serait pas mis autrement pour des raisons pros ou familiales
D’autre part, c’est le pendant négatif, certains se disent aussi qu’ils n’ont pas besoin de faire plus parce qu’ils écrivent sur le net. Un achat de bonne conscience. Un type de comportement qui amènerait par exemple en cas d’occupation à liker un statut sur Facebook qui dirait « Pétain est un con » plutôt que de prendre le maquis. C’est d’ailleurs un gros reproche qu’on peut faire à la blogo que ce soft-engagment bien pensant et souvent inutile. J’ai un peu cherché ce jour les références d’un ouvrage paru en début d’années sur le sujet, sans arriver à le trouver, qui disait en gros la même chose .Sans compter que s’exprimer sur le web n’amène pas forcément à gérer les conséquences de ses actes. Combien de révolutionnaires très radicaux sur la toile restent bien au chaud en pantoufles sans même faire la moindre manifestation ? Outil de militantisme, la toile peut aussi être un élément qui remplace un vrai engagement.
Jegoun lui pointe un phénomène autre: celui de la montée des réseaux sociaux face aux blogs. Non pas que les deux choses soient à mon sens (ni au sien je pense ) complétement antagonistes. Bien plus, les premiers sont un outil de diffusion important des contenus des premiers. Mais la multiciplication des lieux d’expressions sur la toile fait que bien évidemment le blog n’est plus le seul lieu, loin de la, pour s’exprimer sur le web. Facebook, Twitter permettent de diffuser l’info, qui est amenée presque toute seule à l’utilisateur qui n’a pas besoin d’aller consulter ses flux rss ou de taper l’adresse de multiples supports. Google Plus va chercher de plus en plus à être la prochaine étape, à mi-chemin entre ce que fait Facebook et les blogs. Et puis, avec les réseaux sociaux pas besoin d’ouvrir un site, de le paramétrer, de l’entretenir, de structurer: sur twitter vous dites toutes en 140 caractéres, avec, assez rapidement, un nombre de lecteurs de votre prose qui la voient défiler.
Du coup le blog change un peu: plus de gens qui s’expriment sur le web, lisent les blogs, prennant leurs informations sur la toile mais un moins fort pourcentage de blogueurs à l’intérieur de ce groupe de gens. Et chez les blogueurs, surtout ceux bénéficiant d’une certaine reconnaissance, plus de lecteurs qu’auparavant, moins de billets très courts mais aussi moins de commentaires sur le blog lui-même. On a désormais souvent plus de commentaires au sujet d’un billet non dans le champ prévu sur son site mais sur les réseaux sociaux. Ce qui est un peu agaçant venant du fait que la discussion se déroule à plusieurs endroits, atomisant parfois un peu le débat. Sans compter qu’avec la prise en compte d’un certain nombre d’entre nous par les médias traditionnels, il n’est pas rare qu’un billet sur un blog considéré comme pertinent soit repris par un site de journal classique comme Marianne ou le Plus du Nouvel Obs. Ou mieux dans ses formes classiques: un certain nombre de blogueurs chroniquent désormais dans des supports papiers ou radio. Et puis tous les pure players qui se multiplient incluent une dimension d’intégration des contenus de blogs, que ce soit à Rue 89, à Newsring (qui ouvrira prochainement) Owni, Mediapart, Atlantico, Slate, Electron Libre…
L’avenir du blog politique est la: davantage pris en compte par les supports (nombreux sont les projets de médias traditionnels et de campagne incluant les blogueurs) plus lus, proportionnellement moins nombreux, bien mieux considérés qu’avant par les leaders politiques et les décideurs. Pas mal, à condition d’offrir un contenu différent de la simple reprise d’info. Et de s’intéresser à des territoires sur lesquels on peut aussi, via son blog et/ou le reste, être acteur. La situation nouvelle n’est pas tendre avec les blogs à faible contenu ajouté. Et puis, sauf à considérer cela comme un simple loisir, ce qui est un choix parfaitement honorable, ne pas se contenter de cela si on considère son blog politique comme un engagement fort.
Billet repris sur le site de l’hebdomadaire Marianne