Un peu partout dans le monde, être peu ou pas payé pour un travail porte divers noms.
Travaux d’intérêt général dans le meilleur des cas si vous avez causé par exemple un scandale sur la voie publique ou esclavage en cas de malchance un peu plus poussée.
A moins que vous n’ayez le malheur d’être une femme vivant en couple et donc, les statistiques le montrent, souvent victime d’un fort déséquilibre dans les tâches ménagères ? A moins, plus sympathique, que vous ne soyez bénévole dans quelques associations ou causes ou chroniqueur sur un site internet.
Mais il existe également un autre type de travail gratuit, un cérémonial généralement dédié à une étape de l’existence du jeune travailleur en devenir : le stage. Certes, beaucoup d’entreprises, parfois disposant de peu de moyens, passent du temps à apprendre le métier à ceux qui viennent passer quelques semaines ou quelques mois chez eux. Certes la législation a un peu évolué et aujourd’hui il est moins rare qu’avant d’être un minimum défrayé. Mais moins rares aussi sont les abus.
Internet est riche de ces annonces de directeur régional trilingue expérimenté devant encadrer une équipe et remplir des objectifs importants en terme de développement du chiffre d’affaires le tout pour un défraiement de 500 euros par mois (annonce authentique). Ou de demande de développeurs informatiques disposant expérience 10 années et la maîtrise d’autant de logiciels pointus, prêts à exercer leurs talents bénévolement ce qui n’empêchera pas la compagnie les employant de revendre le fruit de votre prestation à prix d’or.
Le phénomène ne touche pas que de modestes entreprises débutantes ayant du mal à boucler leurs fins de mois puisque de grosses sociétés des télécoms, des agences de communication reconnues, de grandes structures de presses y ont souvent recours, pour des postes de plus en plus qualifiés. Ce sont sans doute des centaines de milliers d’emplois qui disparaissent ainsi par effet d’opportunisme. En période de chômage cela amène à réfléchir.
Certes les entrepreneurs peu scrupuleux ne sont pas les seuls coupables. Oui il est vrai que le stagiaire n’a pas le choix : il doit étoffer son cv pour pouvoir tenter de rentrer sur le marché du travail et/ou valider son année d’études.
Mais donnez le choix à nombre de jeunes gens entre travailler bénévolement quelques semaines dans une agence de com, dans un journal ou chez un revendeur informatique pour zéro euros ou être un apprenti charpentier rémunéré et vous serez surpris de voir que la dernière possibilité est généralement aussi délaissée qu’un steak de bœuf lors d’un pique-nique de la section lyonnaise de l’Association des Végétariens de France.
Il est vrai que beaucoup de jeunes gens en devenir voient le stage comme une porte vers le graal d’un métier mal payé mais sympathique comme journaliste ou tout ce qui à trait de près ou de loin à un musée. Ou à certains jobs politiques, qui en plus cumulent l’avantage de la précarité.
Leur travail sera à ce moment-là le même que celui qu’ils avaient lorsqu’ils étaient en stage avec comme avantage, en plus du salaire, de pouvoir regarder de façon un peu paternaliste leur successeurs en apprentissage bénévole. Ceux qui, quelque part, au vu du fait qu’ils doivent se nourrir et se loger comme tout le monde, payent pour le privilège de faire quelques photocopies et d’offrir leur travail. Les braves petits. En plus ils seront très utile en cas de gaffe de l’entreprise puisque chacun sait que tout problème est de la faute du stagiaire.
Mais ne crachons pas non plus sur le stage : il apprend quelque chose d’essentiel au futur salarié : se plaindre d’être mal payé.
chronique parue sur Lyon Mag