C’est entendu,En ces jours où l’on fête l’anniversaire de Rosa Luxembourg et de Wikipedia et où Ben Ali s’enfuit, les couloirs ont parlé, Marine Le Pen a gagné l’élection interne du Front National. Il est d’ailleurs assez guignolesque que de croire qu’une commission électorale puisse se reunir des heures et des heures avant une proclamation de résultats prévue dimanche sans que rien ne filtre.
On pourra longtemps analyser les raisons de la victoire de Marine Le Pen. Par exemple, les médias français, considérés y compris par la presse de droite étrangère comme trop proches du pouvoir, ont-ils sciemment aidé à la victoire de celle qui serait le plus à même d’apporter son concours à l’UMP en l’invitant infiniment plus que son concurrent ? On ne sait.
Toujours est-il qu’il y a un paradoxe: alors que tout le monde titre sur un retour du FN après des années de vaches maigres et ses bons chiffres dans les sondages, jamais ses idées n’ont été à ce point minoritaires dans la population.
Le droit de vote des étrangers aux élections locales après un certain temps de résidence est désormais majoritaire chez les français. Jamais le droit de choisir pour les femmes dans leur natalité n’a été si évident pour nos compatriotes, jamais l’inégalité entre les races comme l’a prôné Le Pen père à plusieurs reprises n’avait été autant considérée comme absurde, jamais les mariages mixtes n’ont été si nombreux…
Du coup, devant cet échec le FN est aussi désemparé que le PCF après la chute du mur. Certes il garde ses stigmates et tout comme la droite de l’UMP veut rétablir la peine de mort. Certes il reste vague sur tout ce qui peut concerner le social et les plus démunis. Entre ceux qui veulent supprimer le SMIC ou le RSA et augmenter l’âge de départ à la retraite et ceux qui pensent le contraire, difficile de se retrouver…
Du coup le FN tâtonne. Si, après avoir pourtant dénoncé l’interdiction du voile à l »école, il se bat désormais contre l’autre fascisme de France, celui des islamistes radicaux, si il expérimente de l’autre côté un nouveau positionnement sur le Moyen-Orient alors qu’il est partagé entre antisionistes radicaux et pro-israéliens durs, le principal parti d’extrême-droite de France est déboussolé. Au point que c’est au nom de valeurs hier combattues par le Front comme la laïcité, la lutte contre l’homophobie, l’égalité homme/femme, que Marine affirme se battre et qu’elle essaie également d’adopter sur l’Europe la même rhétorique que les eurosceptiques de gauche. Au point qu’autour de lui nombreux sont ceux qui ont créé des organisations concurrentes.
Voila le paradoxe: alors que le Front brille dans les sondages, son idéologie, son positionnement, sa raison d’être d’origine sont en ruine et restent à repenser.