C’est l’histoire d’un tigre un peu picaresque, un tigre caméléon dont j’avais entendu conter l’existence chez un barbu collégue en général pas mauvais dans le conseil des papyrus à lire.
Oui car ce felin-là est une revue, ce tigre-ci est en papier! Bondissant désormais une fois tous les deux mois, le pelage de l’animal prend divers atours entre ses réglementaires rayures noires.Que la livraison soit vert véronèse, la suivante turquoise, la derniére gris bureau ou une autre chaudron, le pelage est chatoyant.
Le tigre est, c’est connu, animal d’appétits carnivores voire cannibales.
Ce qu’il y a dans le ventre de la revue est un copieux festin digne des plus nobles familles du Bengale.Le concept est un peu particulier puisque le Tigre est, à mon sens, une revue contemporaine surannée, une uchronie.
La publication s’inspire en effet, comme son site permet également de l’apercevoir, du design du début du siécle précédent,ce qui est logique puisqu’elle porte le même patronyme que celui attribué à un célébre président du conseil.Le langage utilisé comporte souvent une touche de daté et les fausses publicités (La revue n’en comporte pas de vraies) tirées ou imitées de gazettes de 1910 et parfois, quasi-anachronisme, des années 1950.
Les pages, la typographie évoquent plus volontairement le sépia, l’art nouveau et les programmes pour les combats de Marcel Cerdan dans la convocation d’une esthétique désuete que les oeuvres du Poro ou du Blue Noses Group.
Les sujets et la maniére de les aborder participent aussi de cette uchronie puisque la revue, loin de se concentrer dans la muséalité, aborde aussi des sujets trés actuels de façon fort amusante, fussent-ils, en apparence du moins, futiles.Du test de hamburgers avec un énarque empruntant la voiture du ministre pour se rendre au fast-food à la réflexion sur la langage SMS ou dans des statistiques sur Meetic, le Tigre passe à d’amusantes conjugaisons ou à des BD trés futur antérieur…Un bonheur de lecture pour 6,80 euros (rappellons que le Tigre est libre de pub).
Pourquoi évoquer l’auguste animal en ce début de week-end ? Tout simplement parce que j’ai fait vivre, sans le vouloir mais tout en m’en félicitant, un effet papillon au Tigre.Aprés l’avoir découvert sur le blog de mon barbu collégue mentionné plus haut, je suis allé réclamer la revue à Fabrice, le sympathique et célébre patron du tabac-journaux de la rue Sébastien Gryphe qui ne le distribuait pas alors.Certes on peut chasser le fauve epistolaire en presqu’ile mais, bon, si il faut aller à l’étranger pour ça.Et j’avais idée de rapprocher la bête de ses victimes.Bien m’en a pris car Fabrice a adoré la revue et en a vendu plein d’exemplaires.Comme il est sociable il a sympathisé avec l’équipe de la revue et comme il est organisé, il les fait venir pour une soirée conviviale à la Boulangerie du Prado 69, rue Sébastien Gryphe demain à 20H.
Au programme :
Projection et sons : 30 minutes d’amour, courts métrages de Cécile Mille et canulars téléphoniques d’Arenaud Poun extraites de la rubrique Allô Conso.
Le tout en présence des responsables du journal Laëtitia Bianchi et Raphaël Meltz suivi d’un concert de Poupée Mobile.
De quoi rugir pendant que nos rubgymans finiront leur match à Oyonnax, nos footballeurs affronteront l’école de Nancy et nos hockeyeurs entameront leur saison contre Mulhouse.
Et pour finir, je ne résiste pas à la retranscription d’un extrait du précis de conjugaison ordinaire, ouvrage riche en verbes décalés, cité dans la dernière livraison de la revue à rayures tigresque:
Aimer ça, hein ?
Subjonctif présent
Que j’aime ça, hein ?
Que t’aimes ça, hein ?
Qu’il, qu’elle, qu’on, que ça aime ça hein ?
Que nous aimons ça hein ?
Que vous aimez ça, hein ?
Qu’ils, qu’elles aiment ça, hein ?