Le roi se meurt est actuellement présenté à l’Espace 44 jusqu’au 24 mars à l’Espace 44 dans les pentes de la Croix-Rousse.
Le travail présenté est celui de la fusion de deux troupes professionnelles et expérimentées, le Nolo Kingdom Festival, qui a joint de ses bras la compagnie de l’Alternance,
Ce classique de Ionesco est ici mis en scène par l’une des deux factions unies, abrégé de quelques scènes et quelques textes par Hervé Hartmann, par ailleurs incarnation de l’inhumain médecin de la pièce.
Un texte du Roi se Meurt aéré
L’Espace 44 est un lieu petit et intimiste et les acteurs doivent agir sur une prose assez dense de Ionesco.
Cette respiration du texte original, sans vouloir tenter un jeu de mot soufflant ou reniflant, est des plus inspirée. Cela permet de donner de l’air à un sujet qui dans cet espace un peu confiné que sont les frontières du royaume finissant sur lequel règne en apparence le roi Bérenger 1er.
Incarné par un Arnaud Chabert aux paupières peintes d’yeux fatigués, le souverain est à l’égal de son royaume un long essoufflement, une destruction lente et progressive qui se lit sur son visage pourrissant . Chabert donne à cette âme qui se perd
le débonnaire de ceux qui ont beaucoup conquis, beaucoup tué et emplissent leur puissance passée de larges parts des énergies retirées, à d’autres. On pense à des royaumes au pouvoir factice et aux dictatures réelles comme le Swaziland ou la finissante république fasciste de Salo.
Personnage central, le roi est lié aux autres personnages, qui dépendaient hier de lui et dont les mêmes liens marquent aujourd’hui la douloureuse dépendance avant que ne se ferment les ventaux de la fin.
Martine Romera, reine Marguerite des amours passées et des passages aux enfers, démontre par sa sécheresse qu’elle n’y croit plus, qu’elle n’y a peut-être jamais cru. Jamais. Mais elle sera la dernière.
Alors que la fraiche Marie, sous les trait d’Elodie Lasne, est le griot, la supportrice jusqu’au boutiste, l’incarnation de la fraicheur et de la vie, la volonté d’éloigner au plus loin, au plus nié, le passage fatal des eaux du Styx.
Face à cela, dominés de tous temps, à la croyance solide mais chancelante: Juliette, la bonne: Eliane Bochet, très nature comme il sied au rôle et le Garde, très émouvant en conteur des gloires passées: Denis Dierickx.
Les deux ont servi, par confort et par nécessité le roi, jusqu’au formalisme le plus grand, jusqu’à ces temps où subsistait, comme dans les bunkers des dictateurs assiégés, toujours un ordre théorique figé, jusqu’à l’absurde.
Une normalité que refuse le médecin incarné par Hervé Hartmann. Son personnage, qui a charge des corps, est entièrement dépourvu de parcelle d’âme ou de compassion. On pense à certains expérimentateurs sinistres historiques, ou plus récemment et de façon certes moins dramatique à certains de ces chirurgiens libéraux qui ne font du soin qu’un commerce indifférent au monde. On a envie de baffer l’acteur et metteur en scène tant il ricane du tragique de l’humain pourrissant.
Une envie de baffer qui monter la réussite son œuvre, à aller voir absolument jusqu’au 24 mars prochain.
Informations pratiques Espace 44, 44 rue Burdeau métro Croix-Paquet téléphone 04 78 39 79 71 ou sur la page internet de la pièce Le Roi se Meurt sur le site de l’Espace 44