Lyonnitude(s): L'élection de Marine Le Pen ou de Bruno Gollnisch ne concerne pas que le FN

La bataille pour le contrôle du Front National est un vrai déterminant dans la vie politique de ces prochaines années et affecterait durablement la droite mais aussi la gauche. Le parti présidentiel pourrait être tenté, après avoir vu certains de ses électeurs partir, déçus ou au contraire décomplexés par les discours gouvernementaux, de se rapprocher du Front National. Mais, certes bien plus marginalement, des électeurs de gauche pourraient s’y laisser aller également.

Il y a une guerre en ce moment dans un grand parti politique français. Des personnes, qui pensent bien évidemment à la présidentielle, vont s’affronter bientôt dans un vote.  La lutte est féroce. Je parle bien sûr du Front National. Vous pensiez à quelque chose d’autre ?

Deux candidats, Bruno Gollnisch, de l’autre Marine Le Pen, pour le siége de responsable du parti. Puis pour l’investiture à la présidentielle.

D’un côté un FN classique, de l’autre un changement de cap qui pourrait amener à un changement radical de la politique française.

En effet, si Gollnisch est élu, il continuera sans nul doute la stratégie d’isolement de son parti, tentant par ici et par la de continuer la contre-société frontiste si chére à de nombreux militants. D’où un soutien de la presse classique proche du parti

Si le Marine Le Pen est désignée par les militants, il y aura sans doute un gros changements dans le monde politique français. Bien loin d’être une rentrée dans les rangs de l’extrême-droite ou de voir survenir un FN débarassé de ses oripaux les plus glauques, c’est au contraire la scéne politique française toute entiére qui risque d’être droitisée dans ses sujets politiques.

Marine est, cela a été dit et redit, le prétexte qu’attendent certains à droite pour tendre la main au Front National. Si Christian Vanneste a le premier lancé la possibilité d’une telle alliance, il est loin d’être le plus dangereux avocat de la fusion droite/extrême-droite. On parle très souvent du conseiller de Sarkozy Patrick Buisson. Dés le début des années 80 l’homme pronait le rapprochement du Front National et de la droite classique, tel qu’il se vivait au journal Minute par exemple. Le tout pour reconquérir le pouvoir aux socialistes.Chirac dans ces années d’opposition fut le rempart intransigeant contre toute tentative de rapprochement du FN et du RPR et refusa cette stratégie.

Aujourd’hui Chirac n’est plus au pouvoir. Sarkozy et Buisson si. Et Marine, avec le ravalage cosmétique qu’elle peut impulser être le prétexte d’une rupture avec le refus du FN. Son parti, loin de devenir sage,  pourra au contraire faire avancer ses sujets, par exemple le rétablissement de la peine de mort, les conditions du séjour des étrangers ou le durcissement des conditions pour les femmes d’avorter, positions que partagent aussi certains députés UMP. L’ouverture se ferait alors non plus sur la gauche mais sur la droite du parti sarkozyste. Et tout comme en Italie, le socle électoral ainsi obtenu permettrait un maintien à long terme de la droite et de l’extrême-droite au pouvoir. Tentant pour un Sarkozy en mal de popularité et qui n’a pas reussi à attirer sur le long terme les électeurs de l’extrême-droite.

La chose est toutefois à nuancer la chose à court terme: les ténors du gouvenement actuel n’ont pas vraiment le profil à siéger à côté des frontistes. J’ai pour ma part du mal à imaginer Alain Juppé par exemple dans la même équipe que Marine.

Mais le gâteau risque d’être gros et de susciter des appétits: Il y aura pour voter Fn, outre ses sympathisants, les déçus du Sarkozysme. Mais aussi, très certainement, des partisans de gauche. En prenant modéle sur la campagne du FPO de Vienne sur « la défense des femmes libres face aux femmes voilées » ou en brandissant une menace sur « le danger islamiste » comme le disent les partisans du VVD aux Pays-Bas, c’est un certain électorat qui peut partir au front…Certes la perte sera moins forte à gauche qu’à droite, où les thématiques frontistes sont plus présentes. Mais un certain agacement mal contrôlé de certains électeurs devant le flotement de certains partis de gauche sur la burqa peut tenter certains de se tourner vers certaines mauvaises réponses. Riposte Laique n’est peut-être que le début d’une série et je vois avec surprise des gens de gauche venir vers Marine Le Pen. Même si je le répéte, l’essentiel viendra d’électeurs de droite décomplexés par le comportement et certains propos de Sarkozy.

Et puis le climat envers l’autre n’a jamais été aussi fermé et le repli sur son identité, sexuelle, religieuse, nationale etc…jamais si fort. Triste et fécond terroir pour des politiques sinistres.

Il faut donc savoir être fermes. Mais aussi savoir, ce qui se fait de moins en moins, faire parler le vivre-ensemble, menacé par la xénophobie et les discriminations mais aussi par de nombreuses formes de communautarisme confinant souvent elles aussi au racisme.

Le paysage politique risque de n’être plus comme avant si Marine Le Pen prend le FN. C’est pourquoi il convient d’y réfléchir sérieusement.