Charlie en allant à la boucherie.

Charlie je l’avais découvert en première année de fac. C’était un peu le journal officiel du campus de Bron à Lyon 2. Le marchand de journaux qui s’y trouvait en recevait des piles massives. Et dans cette époque où nous n’avions pas encore photoshop, les unes nous resservaient souvent dans les manifs.

Je m’y suis abonné à plusieurs reprises à Charlie : D’abord dans mes années fac à tarif très réduit. Puis j’ai arrêté faute de sous au moment de me réabonner. Puis plus tard, lorsqu’il y eu le conflit Charlie Hebdo et Siné Hebdo et que je voulais montrer ma solidarité avec les premiers et soutenir le second qui était en difficulté financière. Déjà je sentais monter une haine massive contre le journal, accusé de tous les torts parce qu’il dénonçait tous les maux, de façon universelle et universaliste. Tous les maux. D’où qu’ils viennent. Montrant d’ailleurs des fractures grandissantes à gauche qui existaient bien moins avant. Quand c’était le journal officiel de Bron.

Et puis le journal a brûlé. Et puis on a trouvé des gens pour excuser ça. Et puis le journal a eu de graves difficultés financières. Et Beur FM et quelques autres dont une conseillère ministérielle de gauche ont trouvé rigolo d’envoyer des chèques de zéro euros. J’ai eu l’impression, avec peu d’autres, d’être un peu seul à lancer un appel aux dons. Avec un titre d’article dans le Huffington Post « Ricaner devant le cerceuil de Charlie Hebdo » que j’aurais voulu bien moins prophétique.

Et quand il ont tué à Charlie il s’est encore trouvé des gens pour excuser. Dire que c’était faux. Qu’il l’avaient bien cherché. Comme si, et le Bataclan et le reste l’ont montré, ce n’était pas nous tous qui étions attaqués à travers Charlie. Comme si la République ne devait pas se défendre. Islamistes radicaux et extrême-droite, ennemis croisés de la patrie républicaine ne s’y sont pas trompé. Que ce soit en trollant les billets comme ailleurs ils n’étaient pas Charlie.

Il y eu de gros rassemblements il y a un an. De grandes déclarations. Des rassemblements câlins collectifs . Des numéros collectors vendus à prix d’or sur E-Bay. Et d’autres proposés à prix symboliques après le premier rassemblement du soir. Il y eu ces discussions. Ces débats. Ces élans. Ces comiques qui essayèrent de refaire un buzz sur les morts. Il y eu les postures décalées pour se la jouer rebelle décalé. Il y eu les beaux gestes. Il y eu ce rassemblement il y a un an il y a un soir aux Terreaux.

Il y eu ceux qui lâchèrent Charlie à la première chose qui n’allait pas, la dictature du bon goût et de la caricature pas comprise. Les mêmes qui disent qu’il faut lire les religions entre les lignes s’indignent au premier degré de dessins. Je revendique d’essayer d’avoir une lecture complexe de tout en ces périodes de révoltes sur clavier au kilomètre. Je suis Charlie. Soyons unis.