Libérez nous des enfants de 68!

La loi de modernisation de l’économie a été présentée ce matin en conseil des ministres. J’aurais l’occasion de revenir trés prochainement sur des dispositifs ménageant quelques bonnes idées à des mesures assez problématiques. Notons déjà que les points concernant la libéralisation des grandes surfaces fait polémique, notamment vis à vis du commerce de centre-ville. J’aurais l’occasion de revenir en tous cas sur ces dispositifs et sur un loi dont le projet « brut » n’est pas disponible sur internet. Seul le dossier de presse est accessible sur le site du ministère. Bravo la transparence !

Autre sujet qui fait discussion ces jours-ci c’est mai 68 Oui il est plaisant de voir évoquer par les acteurs de l’époque ce qui fut un moment libertaire et social et à ce titre j’ai beaucoup apprécié la série de portraits lancés par Lyon Capitale sur ce que des personnalités lyonnaises faisaient en ce célébre mois. Oui les pavés de 68 ont parsemé un chemin de conquêtes de société. Mais le monde a changé et il est aujourd’hui semé et dominé par la génération 68, qu’elle ai été du côté des barricades ou de celle des participants aux défilés conservateurs de Juin.

Oui, manifestants comme contre-manifestants, les enfants de cette année de la fin de la décennie  ont sans doute semé mais ils ont gardé et fait gardé les mêmes méthodes agricoles et ont parfois empêché les jeunes paysans venus après de reprendre la terre pour la cultiver à leur façon. Et ils ont surtout gardé les blés pour eux.

Il ne s’agit pas de faire un procès de l’événement, de se comporter comme ces militants de droite qui veulent revenir avant 68.D’ailleurs que veulent ces adhérents de l’UMP réellement ? Car Mai 68 a porté nombre de réformes survenues plus tard, un peu chez Giscard, souvent avec l’appui de la gauche d’ailleurs face à une droite qui n’était pas toujours, loin de là, pour le droit à l’avortement, puis par la suite beaucoup sous Mitterrand.Pensent-il que la liberté sexuelle, le fait qu’il soit légal et non considéré comme une maladie psychiatrique d’être gay ou l’égalité en Droit entre hommes et femmes soit une mauvaise chose? Pas étonnant que l’un des plus enthousiastes députés de la majorité présidentielle vis à vis de cette initiative soit le trés réactionnaire député Vanneste, condamné pour homophobie…

Non,certes pas de procès vis à vis l’événement en soi, qu’il soit celui des barricades ou de la contre-réaction de Juin qui donna jusqu’à Chaban-Delmas et après lui une politique d’une violence inouie. Sans jeux de mots, Marcellin n’était pas un saint, saints qui comme tout protestant le sait, n’existent pas.

Non, c’est plutot la gestion de l’aprés 68, par ses enfants, les boomeurs qui ne sont plus baby depuis la fin des années 50 qui me pose question.D’ailleurs même l’un de ses plus admirables rejetons, Daniel Cohen-Bendit, vient de publier un fort recommandable ouvrage demandant d’oublier un peu ces histoires!

L’exemple révélateur est musical. Ainsi, fréquemment, rien n’est intéressant pour le baby-boomer issu de la génération 68 en dehors de ses idoles de jeunes. Le suicide de Kurt Cobain n’est rien à côté de la mort d’Hendrix, les yéyés sont mieux que le rap et Sheila mieux que Babylon Circus…

Les festivals d’aujourd’hui ne valent pas Woodstock et tous nos chanteurs ne poussent que des braiements.

Nos révoltes, nos dates symboliques, mêmes ne valent rien. Je me souviens ainsi de mon premier mouvement étudiant, en 1995, et de ces enseignants ou journalistes conseilleurs, qui nous expliquaient qu’il ne fallait rien faire, que tout était mieux de leur temps, même la révolte, qu’ils se rebellaient plus et mieux et pour des choses utiles, non de non!

D’ailleurs pour que 68 reste unique, le boomeur a trouvé des astuces. Plus question de sécher les cours pour manifester et/ou baiser, le contrôle de présence en TD a été instauré par les fans du « tout permettre ». Plus question de laisser l’avenir ouvert car bien que le boomer soit entré en entreprise avec peu ou pas de diplômes il exige à l’enfant de 68 une montagne de parchemins et de stages pour l’intégrer à la structure dans lequel il occupe désormais des responsabilités.Et d’abord le plus souvent à titre de stagiaire. Veut-il être payé d’ailleurs ce stagiaire? Ah ? Décidément quel matérialisme ces jeunes!

En politique c’est un peu pareil. Aprés avoir parlé égalité homme-femmes tout en en intégrant le moins possible dans les postes d’élus, le boomeur sentant sa carrière politique possiblement menacé aprés toutes ces années de régne, a instrumentalisé la parité. Ainsi sur les listes, sur le quota réservés aux hommes, les notables soixante-huitards se servent en premier et dévorent, laissant fort peu de choses aux petits lionceaux des générations suivantes…Le renouvellement attendra et si il force la porte, nous saurons bien trouver des régles ou nous coaliser pour éviter ça (bien que nous soyons officiellement contre le communautarisme), d’ailleurs nous les boomeurs on connait la jeunesse, on a fait 68, il y a 40 ans, vous vous souvenez? On va aider à vous souvenir!vous pouvez pas savoir, vous avez rien vécu. Nous sommes les enfants de 68, la seule génération politique. N’essayez pas de réinventer la gauche ou la droite, les solidarités, la politique, la sexualité et le travail, vous serez des puérils et/ou des traitres.Rien n’existera plus après nous ! Il nous est autorisé de vous l’interdire…